Le rôle des Eglises auprès des familles. une comparaison France – Allemagne

Que cetravers des niveaux divers – individuels, locaux, nationaux – les Eglises exercent une influence sur les familles et la politique familiale. D’une part, les positions de l’Eglise catholique se distinguent de celles de l’Eglise protestante. D’autre part, en ce qui concerne la participation à la politique familiale, on constate pourtant plus de points communs entre l’Eglise catholique et l’Eglise protestante d’Allemagne qu’entre l’Eglise catholique en France et en Allemagne. En France, la loi de 1905 de séparation de l’Eglises et de l'Etat joue un grand rôle, alors qu’en Allemagne on peut observer une coopération plus directe entre l’Etat et les Eglises dans la politique familiale, pour le développement la soit en France ou en Allemagne, le soutien des familles est d’une importance particulière pour les Eglises, ainsi que la défense des institutions du mariage et de la famille. En effet, les Eglises voient la famille comme un lieu important de transmission des valeurs chrétiennes.

Le rôle des Eglises auprès des familles. une comparaison France – Allemagne

Anne Salles

Que cela soit en France ou en Allemagne, le soutien des familles est d’une importance particulière pour les Eglises, ainsi que la défense des institutions du mariage et de la famille. En effet, les Eglises voient la famille comme un lieu important de transmission des valeurs chrétiennes. A travers des niveaux divers – individuels, locaux, nationaux – les Eglises exercent une influence sur les familles et la politique familiale. D’une part, les positions de l’Eglise catholique se distinguent de celles de l’Eglise protestante. D’autre part, en ce qui concerne la participation à la politique familiale, on constate pourtant plus de points communs entre l’Eglise catholique et l’Eglise protestante d’Allemagne qu’entre l’Eglise catholique en France et en Allemagne. En France, la loi de 1905 de séparation de l’Eglises et de l'Etat joue un grand rôle, alors qu’en Allemagne on peut observer une coopération plus directe entre l’Etat et les Eglises dans la politique familiale, pour le développement des crèches, par exemple. Cela s’explique aussi par la structure très différente des deux Etats en général et de leur politique familiale en particulier.

Die Unterstützung der Familien sowie die Verteidigung der Institutionen Ehe und Familie sind für die Kirchen sowohl in Frankreich als auch in Deutschland von großer Bedeutung. Die Kirchen sehen die Familie als den Raum an, in dem die christlichen Werte hauptsächlich weitergegeben werden. Sie nehmen auf unterschiedlichen Ebenen Einfluss auf Familien und Familienpolitik – individuell, lokal und national. Zwar unterscheiden sich einerseits die Positionen der beiden Konfessionen. Betrachtet man allerdings die Partizipation der Kirchen an der Familienpolitik, so findet man andererseits zwischen der katholischen und der evangelischen Kirche in Deutschland mehr Gemeinsamkeiten als zwischen der katholischen Kirche in Frankreich und der in Deutschland. Dabei spielt in Frankreich das Gesetz von 1905 zur Trennung von Religion und Staat eine große Rolle. In Deutschland dagegen ist die direkte Kooperation des Staates in der Familienpolitik mit den Kirchen zu beobachten, zum Beispiel in der Einrichtung von Betreuungs-möglichkeiten für Kinder. Die Gründe dafür liegen auch in der in beiden Staaten strukturell sehr verschieden ausgeprägten Familienpolitik, die der vorliegende Beitrag untersucht.

Face à la crise démographique qui sévit en Allemagne depuis plus de trente ans et se traduit par un net recul de la famille parmi les foyers allemands, les Eglises catholique et protestante se mobilisent pour apporter aux familles un soutien concret. Que ce soit par la prise en charge des enfants dans les jardins d’enfants catholiques ou protestants ou la participation croissante de l’Eglise aux alliances locales pour la famille (lokale Bündnisse für die Familie) initiées par le gouvernement fin 2003, l’action des Eglises semble s’inscrire dans une volonté de partenariat avec le gouvernement. Plus encore, on peut se demander dans quelle mesure elle ne vient pas se substituer au rôle que jouent en France les institutions publiques.

Car en France, non seulement l’Eglise catholique semble privilégier le dialogue à l’action concrète, mais encore se retranche-t-elle, dans une large mesure, derrière des associations, notamment la Confédération nationale des associations familiales catholiques (CNAFC) – dont les débuts remontent précisément à l’année 1905 et qui bénéficie d’une réelle autonomie – ou des congrégations religieuses telles que Les Petites Sœurs des maternités catholiques. Ainsi, en France, l’Eglise coopère peu avec l’Etat et se maintient en retrait.

Il s’agira ici d’analyser les différences qu’on observe aussi bien dans la forme que dans le contenu de l’action des Eglises auprès des familles en France et en Allemagne, et d’étudier ainsi dans quelle mesure l’Eglise tend en Allemagne, à assumer un rôle traditionnellement dévolu en France à l’Etat et aux collectivités territoriales. Se pose ainsi la question de savoir en quoi ce positionnement illustre des attentes différentes des acteurs sociaux et, donc, une perception autre des relations entre Eglise(s), société et Etat dans les deux pays.

La présente étude porte sur l’Eglise catholique en France, et sur les Eglises catholique et protestante en Allemagne. En France, en effet, la religion catholique est nettement majoritaire, bien qu’en recul. Les catholiques représentent encore 64% de la population française, soit environ dix fois plus que la deuxième religion (l’islam), les Eglises protestantes représentent quant à elles seulement 2%.[1] En Allemagne, en revanche, on dénombre à peu près autant de catholiques que de protestants (respectivement 26,1 millions et 25,8 millions[2]). Il existe différents courants protestants en Allemagne, qui sont cependant, pour une large part, fédérés dans l’Eglise évangélique d’Allemagne (Evangelische Kirche in Deutschland) dont le conseil est présidé depuis 2003 par l’évêque de Berlin, Wolfgang Huber.[3] Après avoir présenté les objectifs que se fixent les Eglises, nous étudierons les moyens mis en œuvre pour les atteindre, puis le rôle que la loi de 1905 joue dans les différences observées entre les deux pays.

Positions des Eglises sur le soutien aux familles

Indéniablement, la famille est au cœur des préoccupations de l’Eglise, catholique comme protestante. Comme le souligne Mgr Olivier de Berranger, évêque de Saint-Denis, « La famille, bien plus qu’une simple unité juridique, sociologique ou économique, constitue une communauté d’amour et de solidarité, apte de façon unique à enseigner et à transmettre des valeurs culturelles, éthiques, sociales, spirituelles et religieuses essentielles au développement de ses propres membres et de la société ».[4] Si la famille est donc « la cellule fondatrice de la vie en société »[5], elle est aussi et surtout le lieu par excellence où se transmettent les valeurs chrétiennes, et donc le lieu le mieux à même d’assurer la permanence (pérennité) des cultes. Les Eglises attachent d’autant plus d’importance à la famille qu’elles la voient menacée. Face à la baisse de la natalité et à la multiplication des familles non conventionnelles (unions libres, familles monoparentales, recomposées, etc.), il leur paraît de première importance d’intervenir pour défendre la famille unie par les liens du mariage.[6]

Le discours du Saint-Siège

Et pourtant, les positions du Saint-Siège sur la famille, l’aide à lui apporter et le rôle de la politique familiale ne manquent pas de surprendre. Certes, le Saint-Siège se prononce en faveur d’une politique familiale active. Le Pape Jean-Paul II avait ainsi demandé aux gouvernements d’aider les familles pour la mise au monde des enfants, ainsi que pour leur éducation. De même, il souhaitait que l’Etat assure un revenu suffisant aux familles par le biais d’allocations familiales, d’un salaire maternel ou de toute autre mesure de politique familiale appropriée.[7] Mais l’Eglise s’est longtemps opposée à toute intervention de l’Etat dans les affaires familiales.[8] De fait, elle rejette toute politique familiale autoritaire et souhaite que l’action de l’Etat reste limitée. Par ailleurs, si le Saint-Siège demande à ce que tout gouvernement garantisse la liberté des couples, il souhaite néanmoins que l’Etat limite l’accès à l’interruption volontaire de grossesse, à la stérilisation et à certains modes de contraception, intra-utérins notamment comme le stérilet.[9] De fait, garantir la liberté des couples signifie pour le Saint-Siège avant tout celle d’avoir des enfants. Malgré cette prise de position quelque peu ambiguë, le Saint-Siège incite, par la charte des droits de la famille, élaborée en 1983, les Eglises catholiques à prendre position sur la politique familiale.

Or on constate des différences notables entre les discours de l’Eglise catholique en France et en Allemagne, a fortiori entre ceux de l’Eglise catholique en France et ceux des deux grandes Eglises en Allemagne. Certes, ils s’articulent dans les deux pays autour des deux mêmes axes : mariage et famille, mais ils sont formulés de manière très différente.

Que signifie en premier lieu soutenir le mariage et la famille ? Soutenir le mariage signifie défendre l’institution, c’est-à-dire lutter contre un alignement juridique des choix de vie dit non conventionnels, tels que l’union libre, avec le mariage. Le mariage doit conserver en tant qu’institution toute sa particularité, son caractère unique, et par là, son importance. Soutenir la famille implique soutenir la natalité, en d’autres termes faciliter le choix des couples en faveur des enfants. Si donc les Eglises s’accordent sur ce double objectif, elles divergent cependant sur la forme que doit prendre ce soutien.

Un objectif commun : l’action sociale

Certes, on observe un noyau commun aux trois Eglises, catholique en France, catholique et protestante en Allemagne, qu’est l’action sociale. Elle constitue en effet l’une des pierres angulaires de l’action des Eglises, qui vient se substituer à la tradition de la charité chrétienne.[10] Elle s’articule autour de deux priorités : le soutien aux familles les plus démunies et l’aide apportée aux personnes en situation de détresse psychologique (grossesse malvenue, drogue, couples en crise, etc.). Dans les deux cas, il s’agit d’une aide qui s’adresse en priorité à des familles en situation difficile, donc à une frange plus marginale de la population, par exemple les familles monoparentales, qui sont plus touchées par la pauvreté, ou bien des adolescents issus d’un contexte familial difficile. Mais au-delà de cette première acception du terme « action sociale », on observe aussi une réflexion plus générale sur la situation des familles dans la société : le coût induit par la descendance engendre un déséquilibre entre la situation financière des familles et celle des couples sans enfant que l’Eglise considère comme une forme de discrimination qu’il s’agit de surmonter.

En Allemagne : une prise de position sur la politique familiale

Comment faciliter le choix des couples en faveur des enfants ? C’est la question que se posent l’Eglise protestante et l’Eglise catholique en Allemagne. Ainsi, soutenir les naissances, c’est avant tout, pour les Eglises en Allemagne, améliorer la politique familiale, afin de créer des conditions favorables à la natalité. Quelles solutions faut-il envisager ? Les propositions des Eglises s’articulent en Allemagne autour de quatre axes.

En premier lieu, il s’agit de permettre une meilleure conciliation entre travail et famille, afin de tenir compte du nombre croissant de femmes qui souhaitent rester en activité, que ce soit pour des raisons financières ou professionnelles.[11] Aussi, les deux grandes Eglises se prononcent en faveur d’un développement des infrastructures d’accueil pour la petite enfance et d’un accueil en journée dans les écoles. En outre, les Eglises s’adressent plus particulièrement aux pères, qui doivent s’impliquer davantage dans la vie familiale et permettre ainsi une répartition plus équilibrée des tâches entre hommes et femmes. Une telle évolution favoriserait le maintien en activité des mères. Enfin, les Eglises demandent aux entreprises d’agir également en proposant un environnement professionnel adapté aux familles, en permettant notamment aux salariés d’accéder à des aménagements des horaires de travail, à des offres de travail à temps partiel, sans être pénalisés dans leur carrière. Ces positions constituent un véritable tournant dans l’histoire des deux Eglises en Allemagne, L’Eglise – catholique notamment – a longtemps milité, en particulier au début des années 1980, contre le développement des crèches, qualifiées de lieux de perdition (« Verwahranstalten ») et pour une prise en charge des enfants exclusivement par la mère. L’Eglise avait ainsi, dans le passé, souligné le rôle irremplaçable de la mère et la nécessité d’un renoncement au moins temporaire à toute activité professionnelle. On constate ainsi un certain « réalisme » des Eglises qui tiennent compte des changements observés dans la société et reconnaissent la nécessité, pour soutenir la natalité, de prendre en considération le souhait d’un nombre croissant de femmes de rester en activité, et par conséquent de rééquilibrer les rôles entre les deux sexes.

En second lieu, l’Eglise catholique souhaite que la politique familiale garantisse le libre choix des mères entre activité et maintien ou retour au foyer. En d’autres termes, la politique de conciliation entre travail et famille ne doit pas pénaliser les femmes qui font le choix de se consacrer à l’éducation de leurs enfants. A titre d’exemple, l’Eglise catholique demande la possibilité pour les mères de choisir entre le nouveau congé parental d’un an qui a été introduit au 1er janvier 2007 et l’ancien congé parental de trois ans.[12] Elle requiert aussi la prise en compte du congé parental pour la retraite.

En outre, les Eglises souhaitent améliorer les conditions financières des familles. Wolfgang Huber, le président du conseil de l’EKD, s’est prononcé en mars 2006 en faveur de la gratuité des jardins d’enfants, ce qui a suscité beaucoup de réactions dans la classe politique. De plus, il s’agit de prévenir les risques de pauvreté chez les familles en menant une action ciblée sur les bas salaires. Les deux Eglises critiquent ainsi la nouvelle allocation parentale d’éducation qui représente un pourcentage du salaire, dans la mesure où elle favorise selon eux les salaires élevés au détriment des familles démunies.[13] Wolfgang Huber a au contraire proposé une allocation parentale d’éducation soumise à condition de ressources, ce qui libérerait des fonds pour développer les infrastructures d’accueil pour la petite enfance et permettrait aux couples dont les salaires sont bas de se maintenir en bi-activité. Enfin, les deux Eglises se prononcent en faveur d’un développement des allègements fiscaux pour les familles.

Le dernier grand axe de la politique familiale concerne le domaine de l’éducation et de la formation. Suite aux mauvais résultats enregistrés dans le cadre de l’étude PISA, menée par l’OCDE dans une trentaine de pays sur le niveau scolaire des élèves en compréhension, en mathématiques et en biologie, les Eglises sont favorables à l’élaboration d’un programme éducatif adapté pour les enfants dès le jardin d’enfants. Celui-ci a pour vocation, avec le développement d’un accueil en journée dans les écoles, de soutenir en particulier les enfants issus de milieux défavorisés – notamment de l’immigration – afin de leur donner de meilleurs moyens pour réussir dans la vie et d’atténuer les écarts observés entre les très bons et les très mauvais élèves.[14] Ce programme doit être élaboré avec la coopération des pouvoirs publics, des parents et d’éducateurs. Mais au-delà des enfants, les Eglises s’attachent aussi au problème de la formation des parents, de l’aide à apporter aux parents confrontés à des problèmes éducatifs spécifiques.

Plus généralement, Wolfgang Huber propose que tous les projets de lois soient soumis à une sorte de « contrôle technique » familial (« Institutionen-TÜV »)[15], c’est-à-dire à des critères de respect et de soutien aux familles. Les points de vue défendus par les Eglises catholique et protestante sont très proches en Allemagne, ce qui les amène à faire nombre de déclarations communes. L’Eglise catholique affiche simplement des positions quelque peu plus traditionalistes, en particulier par le biais d’une défense accrue des droits des mères au foyer. Elle met également plus particulièrement l’accent sur l’importance du mariage, tandis que l’Eglise protestante consacre la plupart de ses interventions et discours à la famille.

En France : des interventions sur des questions éthiques

En France, le soutien aux familles ne prend pas du tout la même forme. Certes, l’Eglise catholique appelle également les pères à s’investir davantage et à opter pour une « paternité responsable ». Mais cet appel s’adresse aux couples, aux individus, non au gouvernement. L’Eglise catholique reste, en France, très en deçà des appels du Saint-Siège. De fait, elle n’intervient pas sur les modes de garde, le soutien financier aux familles, les retraites ou le congé parental. Tout ce qui concerne le quotidien des familles, les aides financières, les infrastructures, ne suscite guère de réaction de la part de l’Eglise catholique en France. En revanche, l’Eglise interpelle le gouvernement sur les débats au parlement pour s’attaquer à des questions comme le clonage, l’avortement, le PACS, le mariage homosexuel ou encore l’euthanasie. En d’autres termes, uniquement sur des questions d’ordre éthique et non proprement politiques.

Ainsi, les Eglises se posent, en Allemagne, en interlocuteurs du gouvernement pour toutes les questions relatives à la politique familiale, tandis que l’Eglise catholique n’intervient, en France, que lorsqu’elle estime les valeurs chrétiennes menacées, donc généralement en opposition à un projet (réformes de l’IVG de 2001 et 2004, introduction du PACS, par exemple). De fait, tandis que les Eglises et les associations ecclésiastiques saluent en Allemagne les initiatives du gouvernement, en France, l’Eglise catholique prend le plus souvent la parole pour critiquer les propositions faites.[16]

De même que les objectifs affichés diffèrent dans une large mesure, les moyens mis en œuvre pour les atteindre ne sont pas les mêmes. Les Eglises interviennent à trois niveaux : un niveau individuel en s’adressant directement aux familles, un niveau local à l’échelle d’une paroisse ou d’une commune, et un niveau national.

Un rôle de conseil et d’accompagnement des familles

Le premier rôle que jouent les Eglises en France et en Allemagne auprès des familles ne passe pas par le gouvernement, mais s’adresse directement aux personnes intéressées. Il s’agit d’un rôle de conseil et d’accompagnement des familles. On distingue deux domaines d’interventions : une action à dimension religieuse et une action à caractère social. Le premier cas concerne la préparation au mariage ou au baptême, le catéchisme ou le cours de religion, ou tout autre sujet à caractère purement confessionnel. L’action sociale consiste, quant à elle, essentiellement en un travail d’écoute et de conseil à l’attention de toute personne en difficulté. Les Eglises organisent ainsi des rencontres, des cellules d’écoute téléphonique, des formations pour les parents, ou toute autre action appropriée en direction des familles. On constate cependant une différence entre les deux pays. Si de nombreuses paroisses en France proposent ces services, ils passent en réalité pour une bonne part d’entre eux par les associations. A titre d’exemple, les congrégations comme les Petites Sœurs des maternités catholiques s’adressent plus particulièrement aux femmes confrontées à une grossesse malvenue, l’association Amour et Vérité propose, comme l’Ecole des parents ou le programme Chantiers-éducation de la CNAFC, des écoles pour les couples et les parents, des formations et des maisons d’accueil. Les Equipes Notre-Dame organisent, quant à elles, des rencontres entre couples mariés. Ce phénomène de transfert sur les associations s’observe aussi en Allemagne, mais pas dans les mêmes proportions.[17]

Une action locale concertée en Allemagne

A cela s’ajoute, en l’Allemagne, la participation à des alliances locales pour la famille. Il s’agit là d’une initiative de l’ancienne ministre de la famille, Mme Renate Schmidt, du parti social-démocrate, introduite fin 2003. L’objectif est de réunir autour d’une table tous les acteurs de la vie politique, économique, sociale d’un quartier ou d’une ville, afin de débattre des moyens qui pourraient être mis en œuvre pour améliorer la situation des familles. Mme Renate Schmidt souligne en effet que toute amélioration de la situation des familles doit passer par l’échelon local.[18] Sont concernés les communes, les entreprises, la chambre de commerce, les syndicats, les associations (de parents notamment) et bien évidemment les Eglises, qui se sont immédiatement proposées pour participer à cette action. Les grands axes en sont la conciliation travail – famille, la mise en place d’une offre de garde de qualité, le développement d’un environnement favorable aux familles, des services de conseil et d’information, le domaine des loisirs, du sport et de la culture, et pour finir, l’élaboration d’offres intergénérationnelles.[19] A titre d’exemple, la paroisse protestante de Moers-Repelen en Rhénanie du Nord – Westphalie, a ouvert un centre pour les familles dont le service de conseil s’est progressivement développé avec la participation de la paroisse catholique et des autres acteurs locaux au point d’offrir aux familles toute une palette d’activités et de services. Dans la ville de Bergtheim, en Bavière, c’est la paroisse qui a mis des locaux à disposition de l’alliance locale pour la famille.

Cette opération amène les Eglises catholique et protestante à coopérer entre elles, mais aussi avec des organisations qu’elles désapprouvent. Ainsi, à Tübingen, elles sont assises à une même table que l’association Pro Familia, dont les positions en faveur d’une libéralisation de l’avortement sont vivement critiquées par les Eglises. Il est à noter que les Eglises sont quasiment absentes des alliances locales pour la famille est-allemandes. Seule celle de la ville de Gera compte la participation du diaconat. Cette particularité souligne la perte de poids des Eglises dans les nouveaux Länder à la suite de la politique de lutte menée par l’Etat de RDA à l’encontre de toute pratique religieuse.

En France, il n’existe qu’une initiative comparable : les ateliers de politique familiale. Ils ont été mis en place par la Confédération nationale des associations familiales catholiques (CNAFC) et rassemble les catholiques intéressés par les questions de politique familiale à l’échelle locale. Ils élaborent des propositions et les soumettent au conseil municipal. Il ne s’agit cependant pas d’une action concertée avec d’autres associations, d’autres acteurs locaux. D’autre part, elles sont peu nombreuses (une trentaine actuellement contre 365[20]alliances locales pour la famille en Allemagne) et ont, de ce fait, un poids limité. Leurs propositions n’aboutissent par conséquent pas nécessairement. Quelques exemples de réalisations locales : la mise en place d’une carte famille, offrant des réductions aux familles, ou bien la diminution de la taxe d’habitation pour les familles nombreuses. Enfin, cette action n’est pas le fait de l’Eglise, mais d’associations catholiques.

Une action nationale

Les Eglises en Allemagne s’efforcent dans la mesure du possible de braquer tous les objectifs sur la famille. L’Eglise catholique a créé, en Allemagne, une commission « mariage et famille » qui a pour objectif de renforcer dans la politique et la société le lobby pour la famille.[21] Elle étudie les possibilités d’une élaboration d’une politique pour le mariage et la famille et a ainsi lancé sur trois ans l’action « Ici commence l’avenir : le mariage et la famille ». Elle a consisté en 2005 à coordonner les efforts, c’est-à-dire à associer toutes les bonnes volontés dans les paroisses catholiques allemandes et à créer ainsi un réseau. En 2006, elle s’est efforcée de proposer des projets de réformes de la politique familiale ; il s’agira en 2007 de présenter le mariage et la famille comme un concept d’avenir et donc d’étudier les perspectives du mariage et de la famille sur le long terme.

En outre, les Eglises multiplient les conférences, les colloques, les séminaires sur la famille et les aides qu’on peut lui apporter. Y sont conviés des spécialistes des questions familiales, comme le sociologue Hans Bertram, mais aussi et surtout les membres du gouvernement. Renate Schmidt et Ursula von der Leyen ont participé à ces forums, ont tenu des conférences dans des églises, organisées par l’une ou par l’autre des deux grandes Eglises allemandes.

En cela, la position des Eglises vis-à-vis de la famille a sensiblement évolué depuis une vingtaine d’années. Tandis qu’elles s’efforçaient, en luttant au début des années 1980 contre les crèches, de ramener la famille dans une sphère purement privée, elles tendent aujourd’hui, au contraire, à lui restituer une dimension publique. C’est ainsi qu’il faut comprendre le discours de M. Wolfgang Huber : « Nous avons tous de la famille ».[22] Il souligne par là que cette question concerne l’ensemble de la société et pas seulement les couples qui ont des enfants. Il revalorise ainsi la famille, mais surtout la place au centre de toutes les questions sociales.

De même que les Eglises interpellent les représentants politiques du pays, l’Etat s’adresse en Allemagne aux Eglises. De fait, les membres du gouvernement citent les représentants des Eglises, se réfèrent couramment à eux.[23] Mme Renate Schmidt, ancienne ministre de la famille, avait ainsi souligné sa satisfaction de pouvoir compter sur l’Eglise catholique et les associations caritatives ecclésiastiques. Elle avait ajouté que les Eglises fournissent un travail remarquable[24], un discours repris par Mme Ursula von der Leyen.[25] Plus encore, le gouvernement demande la participation des Eglises. Ainsi, non seulement les Eglises ont apporté leur contribution au 7e Rapport sur la famille (ainsi qu’aux précédents), en communiquant aux politiques leur point de vue sur les questions relatives à la famille, mais encore ont-elles participé à des actions communes au niveau national. A titre d’exemple, le gouvernement allemand vient de lancer l’initiative « Responsabilité Education » avec les deux Eglises qui porte en particulier sur les programmes scolaires.

On constate donc une interaction très importante entre Etat et Eglises en Allemagne. De fait, on observe, en Allemagne, un large consensus sur les priorités de la politique familiale. Les objectifs que les Eglises fixent à la politique familiale correspondent en effet dans une large mesure aux priorités du gouvernement : des thèmes comme le développement des modes de garde pour la petite enfance, l’importance de la transmission de savoirs et de connaissances dès le plus jeune âge, afin de favoriser l’égalité des chances, ou encore une plus grande participation des pères sont autant repris par les Eglises que par le ministère de la famille. Ainsi, le discours de M. Wolfgang Huber du 28 mars 2006 a été salué par des représentants des partis CDU et SPD. Seule une députée des Verts a critiqué ses propositions. Mme Renate Schmidt, social-démocrate, souligne d’ailleurs ses propres valeurs chrétiennes : « Je suis d’avis que nous autres politiques devrions parler plus souvent de nos valeurs chrétiennes sans pour autant faire de la propagande ».[26] On observe ainsi un consensus en Allemagne sur les valeurs chrétiennes et leur permanence en politique.

En France, la situation diffère du tout au tout. De même que l’Eglise catholique n’interpelle le gouvernement que sur des questions d’ordre éthique et jamais sur des questions de politique familiale ou de soutien aux familles, le gouvernement n’évoque pas les Eglises lorsqu’il est question de politique familiale. A titre d’exemple, l’entrée « Eglise » aboutit sur le moteur de recherche du ministère de la famille en Allemagne à 54 occurrences, en France, il n’en donne aucune. Certes, en 1995, le secrétaire d’Etat chargé des quartiers en difficulté a sollicité explicitement les Eglises pour qu’elles s’associent aux efforts du gouvernement dans ce domaine.[27] Mais c’est bien l’une des très rares occasions où cela s’est produit, et de plus, uniquement dans le domaine de l’action sociale, qui est l’un des rares domaines d’action vraiment reconnus par l’Etat ; or celui-ci est également essentiellement le fait des associations (Emmaüs, Le secours catholique,La croix rouge entre autres). De même, Nicolas Sarkozy est bien intervenu lors de la séance inaugurale de la XIXe Rencontre internationale « Hommes et religions », le 11 septembre 2005, mais à seule fin de parler précisément de la laïcité.[28] La conférence des évêques de France regrette d’ailleurs que les positions de l’Eglise catholique soient jugées conservatrices, donc associées en politique aux mouvements de droite.[29] Loin du consensus national observé en Allemagne, les positions de l’Eglise catholique en France alimente le débat gauche-droite. Cela souligne bien la différence de rapport entre le politique et le religieux dans les deux pays.

En bref, on constate en Allemagne une réelle coopération entre les Eglises et les pouvoirs publics, une volonté de ramener la famille dans la sphère publique. En France, au contraire, subsiste une séparation nette entre l’Eglise catholique et l’Etat, mais une séparation qui est d’une certaine façon une façade ; car un transfert s’est opéré de l’Eglise vers les associations. Une bonne part des aides apportées aux familles sont offertes par les associations, qui, elles, sont en relation avec les pouvoirs publics, ne serait-ce qu’au travers des déductions fiscales attribuées aux dons accordés aux associations caritatives. De fait, le Saint-Siège incite vivement les laïcs à intervenir à leur niveau.[30]

Bilan : Le rôle de la loi de 1905

Quel est l’impact de la loi de 1905 sur ces différences observées entre la France et l’Allemagne ? Evidemment, il est de taille. En premier lieu, la loi sur la laïcité a contribué à restreindre considérablement les moyens financiers de l’Eglise catholique en France, et par là ses possibilités d’action, tandis que le denier du clergé est prélevé, en Allemagne, par les services fiscaux, ce qui assure aux deux grandes Eglises des recettes régulières et importantes. En second lieu, la loi sur la laïcité réduit le champ d’action de l’Eglise. L’Eglise catholique a beaucoup abordé cette question en 2005, à l’occasion du centenaire de la laïcité, et confirmé les limites qui lui sont imposées à elle, mais aussi à l’Etat. La Conférence des évêques de France rappelle ainsi que « les pouvoirs publics n’interviennent pas dans la vie interne de l’Eglise, et l’Eglise n’a pas vocation à gérer le politique ».[31] Néanmoins, la Conférence des évêques de France souligne aussi que cela n’implique pas pour autant une absence de relations et de dialogue. Ainsi, une instance de dialogue et de concertation a été créée en février 2002 avec les représentants de l’Eglise catholique. Mais au même titre qu’a été créé, l’année suivante, le Conseil français du culte musulman, instance de représentation du culte musulman. Comme le mentionne la sociologue Jacqueline Costa-Lascoux, « la laïcité consiste de moins en moins en une indifférence de l’Etat vis-à-vis des religions qu’en une reconnaissance pluraliste des croyances ».[32]

Celle-ci permet une interaction entre les cultes et l’Etat qui autorise une action politique et sociale des instances religieuses en France. Ainsi, l’Eglise catholique justifie ses interventions par son droit, par son devoir de faire respecter, à travers les valeurs chrétiennes, les droits de la personne humaine : « L’Etat de droit n’est pas indépendant vis-à-vis de l’éthique, puisqu’il est au service des droits de l’homme. Ainsi l’Eglise ne sort pas de sa responsabilité quand elle interpelle les pouvoirs publics lorsque l’être humain ou les droits de la personne humaine et son aspect transcendant ne sont pas respectés ».[33] De plus, cette action politique englobe l’ensemble de la population française, et non pas seulement la communauté des catholiques.

En outre, la loi de 1905 permet une action sociale, dans la mesure où « la séparation entre Eglises et Etat n’équivaut pas à une séparation entre Eglises et société ».[34] La loi de 1905 permet ainsi à l’Eglise une action politique et sociale, qui peut être complétée par le rôle des associations. Mgr. Jean-Pierre Ricard, président du Conseil des évêques de France, souligne ainsi que « Ceux qui veulent écarter les religions de l’espace social et les enfermer dans le seul domaine des convictions privées se trompent de siècle ».[35] Comment s’expliquent dans ce cas les limites de l’action de l’Eglise en France ?

Des différences culturelles

L’action des Eglises auprès des familles en France et en Allemagne s’explique aussi par les différences culturelles qu’on observe dans les deux pays.

En Allemagne, l’Etat préfère se maintenir à l’arrière-plan. Il laisse aux familles le soin de se prendre en charge et de pourvoir à leurs propres besoins. En seconde ligne interviennent les acteurs locaux, tels que les entreprises, les associations, et donc les Eglises aussi. Les pouvoirs publics n’interviennent qu’en tout dernier ressort.[36] Cette conception de la politique familiale est d’ailleurs partagée par l’Eglise catholique en Allemagne qui considère que la politique familiale doit consister à « aider les familles à activer leurs propres ressources ».[37] Par conséquent, la coopération entre Eglises et Etat ne témoigne pas nécessairement d’une relation privilégiée entre les deux institutions, puisque les appels du gouvernement s’adressent à tous, c’est-à-dire autant aux entreprises et aux associations qu’aux Eglises. En témoignent d’ailleurs la participation également de la communauté juive à l’élaboration du 7e Rapport sur la famille, ou l’appel du ministère de la famille aux autres cultes.[38] Le gouvernement souligne en effet que la famille est une responsabilité commune : « La politique familiale a besoin de partenaires et d’une nouvelle forme de coopération ».[39] Aussi, l’Allemagne se caractérise par une interaction très forte entre les différents acteurs politiques, économiques et sociaux. On peut parler ainsi d’une structure horizontale. A titre d’exemple, les Eglises s’adressent aussi bien aux individus qu’aux entreprises, auxquelles elles demandent de prendre en compte les besoins des familles[40], et aux pouvoirs publics. Afin d’éviter que trop de pouvoirs soient concentrés dans les mains d’une seule institution, la politique familiale doit être menée sur la base la plus large possible.[41] En témoigne cette question que Mme Ursula von der Leyen a adressé à des représentants du monde économique, des Eglises, des communes et des syndicats: « que pouvons-nous faire pour que l’Allemagne devienne un pays favorable aux familles ? ». La question est intéressante à plus d’un titre. Elle dénote une volonté de placer tous les acteurs politiques, économiques et sociaux sur un même plan, et par là de partager la responsabilité de la politique familiale. A travers cet appel aux autres, la question donne en même temps une extraordinaire leçon de modestie, en soulignant que le gouvernement ne sait pas, et qu’il a besoin de tous les conseils qu’on peut lui donner. Mais il en ressort également un sentiment d’impuissance, un aveu d’échec : nous n’avons pas trouvé de solution.

Rien de tel en France, bien au contraire. La politique familiale, les aides aux familles relèvent des pouvoirs publics, et non des associations, des syndicats, des entreprises, de l’Eglise. Un exemple tout à fait parlant : il existe en France très peu de crèches d’entreprises et de crèches parentales. On ne dénombre que 15300 places dans les crèches d’entreprises, essentiellement dans les hôpitaux, et seulement 8500 places dans les crèches parentales sur plus de 200 000 places en France.[42] De même, seuls 13% des enfants inscrits en école maternelle sont accueillis dans le privé.[43] En Allemagne, plus de la moitié des établissements d’accueil préscolaires sont tenus par les Eglises et les associations ecclésiastiques.[44] On constate en effet en France un fonctionnement beaucoup plus vertical, les aides partant directement des pouvoirs publics en direction des familles. Le niveau intermédiaire que constituent en Allemagne les acteurs privés locaux est quasiment absent du paysage français, ce qui réduit automatiquement les possibilités d’intervention des Eglises. Cette situation pourrait cependant évoluer, dans la mesure où l’Eglise catholique se prononce, en France, en faveur d’actions communes, comme en témoigne le rôle du CECEF (le Conseil des Eglises chrétiennes en France) qui donne aussi la parole aux Eglises réformée et orthodoxe, ainsi que l’avait montré l’appel lancé par Mgr Jean-Pierre Ricard à l’ensemble de la société : « on a besoin de la participation de tous ».[45]

Conclusion

Les différences qu’on observe dans l’action des Eglises en France et en Allemagne auprès des familles sont nombreuses. Tandis qu’elles coopèrent beaucoup avec l’Etat en Allemagne, s’impliquant tant à l’échelle nationale qu’au niveau local, l’action de l’Eglise catholique en France paraît bien timide. De fait, les Eglises se posent, en Allemagne, en interlocuteurs du gouvernement, proposant un véritable programme de politique familiale, alors que l’Eglise catholique intervient peu en France sur les questions de politique familiale, privilégiant les débats d’ordre éthique. De plus, l’action des Eglises allemandes s’inscrit dans un large consensus sur les objectifs poursuivis : elles partagent ainsi les positions du gouvernement et bénéficient d’un appui important dans la classe politique, de gauche comme de droite. En revanche, les prises de position de l’Eglise en France s’inscrivent davantage dans une logique d’opposition et sont souvent critiquées par la gauche comme conservatrices.

La loi de 1905 a incontestablement joué un rôle dans les différences observées. Elle a exercé une influence en limitant les moyens financiers de l’Eglise catholique en France, et, par là, le rôle qu’elle exerce auprès des familles. Elle a notamment restreint les possibilités qui s’offrent à l’Eglise d’agir sur la politique familiale, et l’a amenée à transférer ce domaine aux associations. De fait, on constate plus de points communs entre l’Eglise catholique et protestante d’Allemagne qu’entre l’Eglise catholique en France et en Allemagne. Si la laïcité intervient ainsi dans la forme que prend la coopération entre les Eglises et l’Etat auprès des familles, l’héritage culturel et historique y est aussi pour beaucoup. Il se traduit en effet par une plus grande implication des acteurs locaux en Allemagne qu’en France.

Il faut néanmoins nuancer le propos : bien que la politique familiale réunisse en Allemagne un plus grand nombre d’intervenants à tous les niveaux publics et privés, l’aide apportée aux familles reste globalement plus limitée en Allemagne qu’en France, en particulier dans le domaine de la conciliation entre travail et familles, où les pouvoirs publics sont, en France, particulièrement actifs.[46] Enfin, certes la loi de 1905 conduit à restreindre le champ d’action de l’Eglise catholique en France, mais elle lui permet tout de même d’exercer un rôle politique et social, directement ou par le biais d’associations catholiques. Par conséquent, l’Eglise catholique se dit satisfaite de la loi de 1905 qui lui semble avoir abouti à un réel équilibre entre les pouvoirs publics et les cultes, un équilibre qu’elle ne souhaite pas voir remis en cause.[47]



[1] Chiffres cités d’après un sondage CSA réalisé en 2004, et mentionné dans le journal La Croix, 23 décembre 2004. Le sociologue Jean-Paul Willaime définit ainsi la France comme un « pays laïc de culture catholique ». Willaime, Jean-Paul, Laïcité et religion en France, dans Davie, Grace ; Hervieu-Léger, Danièle (sous la dir. de), Identités religieuses en Europe, Editions la Découverte, Paris, 1996, p. 154.

[2] Statistisches Bundesamt 2005. Chiffres pour 2003.

[3] Voir pour plus d’informations le site www.ekd.de. La présente étude se base en particulier, côté allemand, sur le discours de l’EKD et celui de la Conférence des évêques d’Allemagne présidée par Mgr Karl Lehmann, Cardinal de Mayence (www.dbk.de) et, côté français, sur celui de la Conférence des évêques de France, présidée par Mgr Jean-Pierre Ricard, Cardinal de Bordeaux (www.cef.fr).

[4] De Berranger, Mgr Olivier, La famille otage du jeu électoraliste, dans Documentation catholique n°2233, 1 octobre 2000, p. 832 ; voir aussi Valin, Pierre, Discours de l’Eglise catholique, dans Projet, n°239, automne 1994, p. 26–33

[5] Thomazeau, Mgr Guy (président de la Commission épiscopale de la Famille), La France débat de la famille. Conférence des évêques de France, dans Documentation catholique n°2183, 7 juin 1998, p. 535.

[6] Voir l’intervention de Mgr Celestino Migliore, observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies : Migliore, Mgr Celestino, Défendre et protéger la famille, dans Documentation catholique, n°2313, 2 mai 2004, p. 422. Mgr Bernard Panafieu souligne également l’importance de « promouvoir la famille [et] renforcer l’institution qui lui permet de s’épanouir ». Panafieu, Mgr Bernard, Pour une famille heureuse, dans Documentation Catholique n°2258, 18 novembre 2001, p. 1006.

[7] Voir pour les positions du Saint-Siège : Actes du Saint-Siège : Charte des droits de la famille, dans Documentation catholique n°1864, 18 décembre 1983, p. 1153–1157 ; Conseil pontifical pour la famille (sous la dir. de), Evolutions démographiques et dimensions éthiques et pastorales. Présentation par le Père Philippe Laurent, Editions du Cerf, Paris, 1994, p. 81–86 ; Valette, René, Le catholicisme et la démographie. Eglise, population mondiale, contrôle des naissances, Editions de l’atelier, Paris, 1996, p. 165.

[8] Cova, Anne, « Au service de l’Eglise, de la patrie et de la famille » : Femmes catholiques et maternité sous la IIIè République, Paris, L’Harmattan, 2000, p. 212.

[9] Conseil pontifical pour la famille (sous la dir. de), Evolutions démographiques, p. 86–87.

[10] Cova, Femmes catholiques et maternité, p. 218–219.

[11] Kock, Manfred, Wert und Bedeutung der Familie für unsere Gesellschaft, Vortrag zum Rittertag der Rheinischen Genossenschaft des Johanniterordens, 17 mai 2003 Kaiserswerth, voir http://www.ekd.de/vortraege/kock/kock_030517_familie.html, consulté le 2 juin 2008 ; et Mehr Kinderfreundlichkeit und Generationensolidarität, table ronde organisée par l’Eglise catholique dans le cadre de l’initiative Hier beginnt die Zukunft – Perspektiven für Ehe und Familie le 26 mai 2006, voir http://www.katholisch.de/9752.html, consulté le 2 juin 2008.

[12] Pour les naissances jusqu’au 31 décembre 2006, les parents peuvent souscrire un congé parental de trois ans, rémunéré pendant deux ans par l’Etat – la troisième année étant versée par certains gouvernements régionaux – à hauteur de 300 euros par mois. Ils peuvent alternativement opter pour un congé parental limité à une durée maximale d’un an, mais associé à une allocation parentale d’éducation de 450 euros. Pour toute naissance à partir du 1er janvier 2007, le congé parental est limité, selon le modèle suédois, à une durée d’un an, prolongeable de deux mois au profit de l’autre parent uniquement. Il est rémunéré à hauteur des deux tiers du salaire perçu dans la limite de 1800 euros net par mois et ne peut être inférieur à 300 euros, afin de ne pas pénaliser les femmes inactives. Il s’adresse donc surtout aux mères actives.

[13] Huber, Wolfgang, Familien haben alle – für eine Zukunft mit Kindern, 28 mars 2006, http://www.ekd.de/vortraege/060328_huber_berlin.html, consulté le 2 juin 2008 ; Mehr Kinderfreundlichkeit und Generationensolidarität, paroles du Cardinal Georg Sterzinski à l’occasion d’une table ronde organisée par l’Eglise catholique dans le cadre de l’initiative Hier beginnt die Zukunft – Perspektiven für Ehe und Familie, le 26 mai 2006, http://www.dbk.de/aktuell/meldungen/00971/index.html, consulté le 2 juin 2008, .

[14] Conseil de l’EKD (sous la dir. de), Was Familien brauchen. Eine familienpolitische Stellungnahme des Rates der EKD, EKD-Texte 73, 2002.

[15] Huber, Familien haben alle, 28 mars 2006.

[16] Voir Diakonie begrüßt Elterngeld, http://www.ekbo.de/7517_18664.php?liste=ja&seiten_id= 17541&nav_id, consulté le 2 juin 2008 ; Bouchex, Mgr Raymond (archevêque d’Avignon), Et l’enfant dans tout cela ? , Documentation catholique n°2234, 15 octobre 2000, p. 881–883.

[17] La rubrique « mariage et famille » du site http://www.katholisch.de/4463.html, consulté le 2 juin 2008, propose, à titre d’exemple, la liste de tous les services de conseils aux familles proposés par les différents évêchés d’Allemagne.

[18] Schmidt, Renate : Eine lebens- und liebenswerte Gesellschaft, à l’occasion de la conférence dans la cathédrale de Mayence, le 30 août 2004, http://www.bpjm.bund.de/bmfsfj/generator/ Kategorien/Archiv/15‑Legislaturperiode/reden,did=20550.html, consulté le 2 juin 2008.

[19] Le gouvernement met beaucoup l’accent depuis un an sur la création de « Mehrgenerationenhäuser », des maisons qui ont pour vocation d’offrir des services et des activités à l’attention de personnes de tous âges de manière à renforcer les liens entre les générations (prise en charge de la petite enfance, formations pour les parents, activités culturelles, informations santé, services aux personnes âgées, etc). Les 59 premiers projets de maison intergénérationnelles viennent d’être sélectionnés, http://www.bpjm.bund.de/bmfsfj/generator/Kategorien/ aktuelles,did=86858.html, consulté le 2 juin 2008.

[20] Voir http://www.lokale-buendnisse-fuer-familie.de/, nombre cité le 12 janvier 2007.

[21] Ursula von der Leyen, Zukunftsperspektiven der Familienpolitik, dans Sekretariat der Deutschen Bischofskonferenz (sous la dir. de), documentation Hier beginnt die Zukunft – Perspektiven für Ehe und Familie, p. 17–23, http://www.dbk.de/ehe-familie-kirche/download/doku_ feb06.pdf, consulté le 2 juin 2008.

[22] Huber Wolfgang: Familie haben alle, 28 mars 2006.

[23] Discours de l’ancienne ministre fédérale de la famille, Mme Renate Schmidt à l’occasion du 10e Synode de l’Eglise évangélique en Allemagne, le 7 novembre 2004 à Magdebourg. http://www.bpjm.bund.de/bmfsfj/generator/Kategorien/Presse/reden,did=21552.html, consulté le 2 juin 2008.

[24] Ibid., et le discours de Mme Schmidt le 18 juin 2004 : Kinder und Familien im Zentrum, http://www.bpjm.bund.de/bmfsfj/generator/Kategorien/Presse/pressemitteilungen,did=18870.html, consulté le 2 juin 2008.

[25] Bündnis für Erziehung gestartet, communiqué de presse du 20 avril 2006, http://www.bpjm. bund.de/bmfsfj/generator/Kategorien/Presse/pressemitteilungen,did=73962.html, consulté le 2 juin 2008

[26] Schmidt, Renate, Eine lebens- und liebenswerte Gesellschaft, le 30 août 2004.

[27] Willaime, Laïcité et religion en France, p. 166.

[28] Sarkozy, Nicolas, La laïcité, facteur de paix entre les citoyens, dans Documentation catholique n°2344, 16 octobre 2005.

[29] Berranger, La famille otage du jeu électoraliste, p. 834.

[30] « En raison de leur statut de citoyens, comme leurs compatriotes, les catholiques ont le devoir de participer, selon leurs compétences et dans le respect de leurs convictions aux différents domaines de la vie publique ». Actes du Saint-Siège, Actes du Pape Jean-Paul II, Une laïcité sereine et respectueuse. Lettre aux évêques de France pour le centenaire de la Loi de 1905, dans Documentation Catholique n°2331, 6 mars 2005, p. 203.

[31] Conférence des Evêques de France, L’Eglise catholique et la loi du 9 décembre 1905 cent ans après. Déclaration plénière des évêques de France, dans Documentation Catholique n°2340, 17 juillet 2005, p. 719. Elle rappelle ainsi la « non compétence de l’Etat en matière religieuse et la non ingérence des Eglises dans les questions proprement politiques ».

[32] Costa-Lascoux, Jacqueline, L’expression religieuse dans une société laïque. Synthèse par Jacqueline Lebon, Ministère de l’Aménagement du territoire, de la ville et de l’intégration, Paris, Direction de la population et des migrations. Notes et documents n°28, juin 1996, p. 8–9.

[33] Conférence des Evêques de France, L’Eglise catholique et la loi du 9 décembre 1905, p. 721. « L’Eglise ne souhaite pas s’enfermer dans la défense de ses intérêts communautaires mais contribuer à promouvoir la dignité intégrale de chaque personne humaine dans notre vie sociale, ainsi que la paix et la justice dans notre société ».

[34] Ibid, p. 719.

[35] Ricard, Mgr Jean-Pierre, Conférence des Evêques de France. Discours de clôture, dans Documentation Catholique n°2347, 4 décembre 2005, p. 1133.

[36] Le principe de subsidiarité qui s’observe dans ce transfert de la politique familiale vers les acteurs locaux s’explique notamment par l’héritage historique de l’Allemagne, en particulier national-socialiste. L’Etat souhaite en effet se prémunir de toute dérive autoritaire et garantir une liberté de choix aux individus. Voir pour plus d’informations Salles, Anne, La politique familiale allemande: les limites de l’action de l’Etat, dans Critique Internationale n°31, avril–juin 2006, p. 95–117.

[37] Mehr Kinderfreundlichkeit und Generationensolidarität, table ronde organisée par l’Eglise catholique voir http://www.katholisch.de/9752.html, consulté le 2 juin 2008.

[38] La nouvelle ministre de la famille, Mme Ursula von der Leyen appelle les autres groupes religieux à se joindre à l’alliance nouvellement créée pour l’éducation et la formation. communication de presse, von der Leyen, Bündnis für Erziehung gestartet, 26 avril 2006.

[39] Mme Renate Schmidt souligne ainsi : « la responsabilité pour la famille et l’amélioration des conditions de conciliation entre travail et famille est une responsabilité commune. Les acteurs économiques et les syndicats, les Eglises, les associations, les organisations sociales et les initiatives citoyennes sont aussi appelées à agir aux côtés des parlements et de l’administration. Tous doivent travailler activement et d’emblée au bien-être des enfants, afin de leur donner à eux et au pays, un avenir. », voir Schmidt, Eine lebens- und liebenswerte Gesellschaft, le 30. août 2004.

[40] De la même manière, elles considèrent aussi qu’elles ont, en tant qu’employeurs, un rôle à jouer. Voilà bien une différence majeure avec la France, où l’Eglise ne peut guère être un « employeur » de référence.

[41] Au sujet des interrelations entre dynamique des systèmes de protection sociale et pacte fédéral, voir Münch, Ursula, Sozialpolitik und Föderalismus. Zur Dynamik der Aufgabenverteilung im sozialen Bundesstaat, Opladen, Leske & Budrich, 1997, 340 p.

[42] Hermange, Marie-Thérèse, La Prestation d’accueil du jeune enfant. La Paje en propositions, rapport remis au Ministre délégué à la Famille, février 2003, p. 109–112.

[43] Calculé d’après les données de l’INSEE pour l’année scolaire 2003–2004 (www.insee.fr).

[44] Schmidt, Kinder und Familien im Zentrum, 18 juin 2004 ; voir également von der Leyen, Bündnis für Erziehung gestartet, 20.4.2006.

[45] Ricard, Discours de clôture, p. 1133.

[46] Salles, Anne, Familienpolitische Hilfen zur Arbeitsmarktintegration der Mütter. Ein deutsch-französischer Vergleich, dans WZB-Paper (Wissenschaftszentrum Berlin für Sozialforschung) n°P2005–007, octobre 2005, p. 11–25.

[47] Ibid, p. 1133 ; et Ricard, Mgr Jean-Pierre, Le dialogue nécessaire entre deux humanismes, dans Documentation Catholique n°2344, 16 octobre 2004, p. 971.


Für das Themenportal verfasst von

Anne Salles

( 2008 )
Zitation
Anne Salles, Le rôle des Eglises auprès des familles. une comparaison France – Allemagne, in: Themenportal Europäische Geschichte, 2008, <www.europa.clio-online.de/essay/id/fdae-1688>.
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